L’urine mise au goût du jour de la fertilisation en agriculture

Toute l’urine de l’agglomération parisienne suffirait à fertiliser les parcelles de la région Île-de-France. Ça peut laisser rêveur, perplexe ou même faire peur. C’est un fait ! En tout cas, une équipe française mène des investigations sur l’efficacité fertilisante de cet or… jaune lui aussi.

Mis en place sur le plateau de Saclay, les premiers tests d’urinofertilisation montre la même efficacité qu’avec de l’azote. Au premier plan, la micro-parcelle fertilisée avec de l’urine et juste après la parcelle témoin, sans azote.

« Un kilogramme d’azote apporté sous forme d’urine est tout aussi efficace qu’un kilogramme d’azote apporté sous forme d’ammonitrate », indique Florent Levavasseur, ingénieur de recherche à l’Inrae, suite à des essais agronomiques réalisés dans le cadre du projet de recherche Agrocapi (Inrae, AgroParisTech, École des Ponts), en collaboration avec la chambre d’agriculture d’Île-de-France et d’agriculteurs franciliens. L’efficacité fertilisante de l’urine a été testée sur différentes cultures (blé, colza et maïs grain) durant les campagnes 2017-2018 et 2018-2019.

7 à 8 kg d’azote minéral par mètre cube d’urine

Le plateau de Saclay, petit territoire périurbain situé à une dizaine de kilomètres au sud de Paris, a été le théâtre de ces premiers essais pour la simple et bonne raison que plusieurs projets sont en cours pour l’installation de dispositifs permettant de récupérer l’urine dans des établissements recevant du public. Il existe d’ailleurs différentes techniques pour séparer l’urine – qui représente à elle seule environ 80% de l’azote et 50% du phosphore contenu habituellement dans les eaux usées des villes – directement à la source afin d’éviter toute dilution des éléments fertilisants dans les eaux usées et leur contamination par d’autres rejets.

Il n’est pas question en effet de diluer encore plus les éléments fertilisants de l’urine : « Dans l’urine brute, il faut compter entre 0,7 et 0,8% d’azote, confirme l’ingénieur de recherche. Il faut donc 1 m3 d’urine brute pour apporter 7 à 8 kg d’azote par hectare. La quantité à épandre pour fertiliser intégralement une culture se rapproche de celle du lisier. Cela reste toutefois théoriquement faisable, mais faut-il encore être en mesure d’intervenir dans la culture en place à la date de fertilisation. » On peut imaginer la technique faisable pour le premier et éventuellement le second apport d’azote sur céréales, mais au-delà ?

De l’ammonium prêt à être valorisé par les plantes

Contrairement au lisier, l’azote contenu dans l’urine est principalement sous forme minérale. Moins de 10% de l’azote présent dans l’urine l'est sous forme organique. Pour résumer, l’urine c’est de l’azote minéral dilué dans de l’eau. « Au moment où l’urine est évacuée par un humain, l’azote y est présent sous forme d’urée, note Florent Levavasseur. Dès que l’urine est stockée, en revanche, l’urée est très vite totalement transformée en ammonium. »

Si pour les essais l’urinoertilisation est effectuée avec un pulvérisateur porté, il faut garder en tête qu’un mètre cube d’urine brute ne compte que 7 à 8 kg d’azote - Florent Levavasseur

Ce qui, de par son pH élevé, pose un plus sérieux risque de volatilisation. Si sous serre, aucune différence de performance n’a pu être mesurée entre l’azote apporté sous forme d’urine ou d’ammonitrate – à même dose d’azote totale –, au champ la performance de l’urine peut être diminuée par la volatilisation ammoniacale selon les conditions pédoclimatiques du milieu au moment de l’épandage et le mode d’épandage.

Cependant, que ce soit dans le cadre d’un apport unique à la fin du mois de février (premier apport sur blé) ou dans le cadre d’une substitution totale de l’ammonitrate par l’urine sur l’intégralité de la stratégie de fertilisation, nous n’avons observé aucune différence significative de rendement alors que le plateau de Saclay affiche un potentiel supérieur à 100 q/ha en blé. Ce ne sont bien sûr là que les premiers résultats d’une longue série avant que cette filière ne puisse se mettre en place, sans compter l’acceptabilité sociétale de la chose qui n’est pas encore acquise…

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