Biochar : à ne pas répandre sur tous les sols

 Les biochars sont à réserver à des cas très particuliers de sols très pauvres. © Okrip / Adobe Stock

Un produit innovant… est-il un produit utile ? À l’occasion du Salon internationale de l’agriculture, la société Carbonloop, lancée en 2021, rappelait ses objectifs de fournir l’industrie en énergie verte produite à partir de biomasse ligneuse.

En même temps, la jeune start-up prévoit de développer la filière française du biochar, co-produit de son process de production d’énergie et majoritairement composé de carbone, qui présenterait de nombreuses vertus agronomiques. En effet, selon Carbonloop, le biochar permet :

  • d’augmenter la capacité d’absorption des sols en eau et en nutriments ;
  • d’améliorer la qualité des sols par un équilibrage du pH, une stimulation microbienne et la fixation des polluants ;
  • d’accroître les rendements.

Qu'en pense la communauté scientifique ? À la lecture de ces nombreux avantages, Cultivar a souhaité confronter ces annonces à l’avis scientifique de Vincent Chaplot, spécialiste de la qualité des sols au sein de l’institut de recherche pour le développement. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne partage pas vraiment l’enthousiasme de Carbonloop.

Mais le biochar, qu’est-ce que c’est ? Le terme biochar est l’abréviation de « bio-charcoal ». Son préfixe « bio » signifie qu’il est d’origine biologique et « charcoal », mot anglais, signifie charbon de bois. Il désigne un charbon d’origine végétale, obtenu par pyrolyse de biomasse de matières organiques d’origines diverses.

  • Pour Vincent Chaplot, le biochar englobe « tout un continuum de charbons allant de la paille brûlée, très légère, à des charbons géologiques, très denses. De fait, les propriétés chimiques peuvent être très diverses et donc les interactions avec la vie du sol très variables. »

Les biochars ont un impact environnemental… Ce sont les premières réticences de Vincent Chaplot vis-à-vis de ces charbons.

  • Les biochars, quand ils sont fabriqués par l’Homme, demandent de l’énergie pour être créés. « Ce qui réduit d’emblée leurs bénéfices avancés ».
  • De plus, « ils obligent à une combustion incomplète souvent émettrice de déchets plus importants qu’une combustion complète ».

Ils ne sont pas toujours stables dans le sol. « Ils sont très souvent vendus comme extrêmement stables et donc favorables au stockage de carbone dans les sols », précise le spécialiste de la qualité des sols. Or, leur stabilité à long terme peut être remise en question.

  • Les méthodes d’analyses et d’extraction, que ce soit pour le biochar ou tout autre élément, n’ont jamais été et ne seront jamais aussi efficaces que les plantes et la vie du sol. De fait, la vie biologique parvient à dégrader les biochars, relarguant au passage du CO2 dans l’atmosphère.
  • « Les biochars sont constitués de grosses molécules qui ne peuvent pas se lier à l’argile du sol pour créer du complexe argilohumique. Comme ils ne sont pas liés, des expérimentations ont montré que les biochars subissent donc de manière privilégiée l’érosion par l’eau par rapport aux autres particules de sol », poursuit le spécialiste.
  • Ces charbons, qui sont constitués de nombreux pores, filtrent l’eau du sol en captant les éléments minéraux en solution. « En quelque sorte, ils vident les sols riches en éléments nutritifs. Sans ces éléments à disposition, les microorganismes du sol vont s’attaquer à la matière organique de celui-ci pour alimenter les plantes avec ce dont elles ont besoin. »

Mais ils peuvent être utiles dans des cas particuliers. Dans le cas de sols pauvres, avec une majorité de sable par exemple et très peu d’humus, l’expert estime que les biochars peuvent jouer une partie du rôle de la matière organique qui manque, en captant les éléments minéraux qui seraient perdu autrement, et en retenant l’eau.

  • « Les amérindiens utilisaient cette technique il y a bien longtemps déjà. Il fabriquaient une éponge sur des sols pauvres et apportaient de la fertilité pour rendre ces sols cultivables. »
  • Le spécialiste de la qualité des sols confirme que les biochars ne doivent être réservés qu’à des cas très particuliers selon lui.

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