Le saviez-vous ? Le miel de tournesol représente 6,6% de la production annuelle de miel en France (total de 27 736 tonnes) selon les chiffres 2019 de FranceAgriMer. L’intérêt du tournesol, «c’est qu’il fournit du nectar et du pollen pendant l’été, une période plutôt déficitaire en ressources pour les insectes pollinisateurs », précise Nicolas Cerrutti, chargé d’études biodiversité fonctionnelle chez Terres Innovia, à l’occasion d’une série de conférences en ligne, intitulée «Les Jeudi de TI». Il est utile de préciser que l’abeille domestique est fort utile aussi au tournesol puisqu’elle contribue significativement à la production grainière, jusqu'à 40% selon les variétés.
Cependant, le spécialiste précise que les apiculteurs doivent faire face à certaines difficultés. Ils constatent des miellées irrégulières et en moindre quantité depuis une trentaine d'années, ils observent des performances variables des colonies et des remérages (changement de reine) non aboutis. Sur la base de ce constat, la question de la «qualité de la ressource» se pose.
Nicolas Cerrutti rappelle en effet qu’une bonne production de miel de tournesol est conditionnée par la disponibilité et l’attractivité de la ressource (état de la culture, volume de nectar, qualité et nature des sucres, composés volatils et qualité du pollen). Mais pour les insectes pollinisateurs, encore faut-il que la ressource soit aussi accessible (morphologie florale et profondeur du fleuron). Sans oublier que la colonie d’abeilles doit être dans un bon état populationnel et sanitaire et que les conditions météorologiques sont aussi un facteur déterminant.
Nicolas Cerrutti précise également que l'aspect mellifère d'une variété n'est pas pris en considération en sélection variétale.
La physiologie de la variété compte
À travers le projet ApiTour, Terres Innovia et ses partenaires (AFA, Fédération nationale d’apiculture ; ITSAP-L’Institut technique et scientifique de l’apiculture et la coopérative Terrena) ont conduit des travaux pour tenter d’appréhender le lien entre la génétique, le niveau de fréquentation des abeilles et la production de miel.
«La première étape de l’étude a consisté à évaluer 11 variétés pendant 3 ans en mesurant la fréquentation des tournesols par les abeilles domestiques. Cette première étape a en effet confirmé, les résultats étant répétables d’une année sur l’autre, que la génétique influençait la fréquentation des abeilles, sans pour autant constater que certaines variétés étaient complètement délaissées», résume Nicolas Cerrutti.
À l’issue, 2 variétés aux résultats de fréquentation contrastées ont été sélectionnées. «Nous avons mesuré le remplissage des cadres en miel avant et après floraison. Pour la variété à moindre fréquentation, la production est certes moins importante, mais la quantité de miel avant et après floraison évolue dans les mêmes proportions, donc le lien entre le niveau de fréquentation d’une variété et son potentiel mellifère n’est pas réellement démontré», analyse le chargé d'études.
Toutefois le spécialiste met en garde sur les biais d’analyse, notamment la difficulté d’avoir des territoires totalement homogènes, en termes de climatologie d’une part et par rapport à la présence d'autres espèces mellifères d'autre part.
« Nous avons pu confirmer que la fréquentation par les abeilles est conditionnée par des traits génétiques liés notamment à la physiologie du tournesol mais aussi à la composition en sucres de son nectar. Ces travaux devront être poursuivis et la réflexion élargie pour caractériser l’abondance de la ressource mellifère disponible dans l’environnement » a conclu Nicolas Cerrutti.