La filière betteravière s’interroge pour les campagnes à venir, malgré les signes de reprise

Les voyants économiques sont aux verts pour la filière betteravière. Crédit: georgy rozov/EyeEm/Adobe Stock

Des prix du sucre plus rémunérateurs en Europe, des débouchés alcools et pulpes prometteurs, les voyants économiques sont au vert pour la filière betteravière. Malgré tout, ces perspectives prometteuses sont contrebalancées par de fortes interrogations sur les coûts et les moyens de production.

Alors que la campagne betteravière 2022 touche à sa fin, voici venue l’heure pour le syndicat des betteraviers français (CGB) de faire un bilan chiffré de la campagne 2022. Le printemps 2022 augurait de très belles perspectives pour la production française. Mais c’était sans compter sur la sécheresse sans précédent qui a marqué la période estivale 2022. "Tout était prometteur jusqu’à l’été, nos projections avoisinaient des perspectives de rendements de l’ordre de 85 à 90 tonne à 16°/ha, mais la déception fut de taille, car la moyenne est ramenée à 80 tonnes à 16°/ha pour cette campagne 2022-2023", explique Franck Sanders, président de la CGB, à l’occasion d’un point presse organisé le 30 novembre 2022.

D’autre part, la sole s’est elle aussi légèrement contractée par rapport à la campagne précédente (-1%). Ainsi, la production française est estimée à 32 millions de tonnes, soit environ 3,6 millions de tonnes de sucre et 8,4 millions d’hectolitres d’alcool et d’éthanol. Le démarrage précoce de la campagne a pu lui aussi peser sur les rendements: "Pour anticiper des potentiels délestages sur les périodes hivernales, les usines de transformation ont dû ouvrir plus précocement (date moyenne de réception estimée au 13 septembre 2022). Les planteurs volontaires ont cependant été indemnisés pour pallier ce déficit de rendement potentiel", précise Nicolas Rialland, directeur de la CGB.

Des coûts de production qui explosent

Autre point délicat de cette campagne, l’explosion des coûts de production. Pour cette culture particulièrement gourmande en énergie, le syndicat estime qu’avec l’augmentation du prix du fuel, des engrais et du gaz, les coûts de production en 2022, estimés à 2.641 €/ha, ont augmenté de 16% par rapport à la campagne 2020. "Et si l’on se projette vers 2023, qui intègre la totalité des hausses sur un cycle complet de production, la hausse est estimée à 35% par rapport à 2020", précise Nicolas Rialland. Seul motif de satisfaction, l'annonce d'un prix de betteraves payé au-delà des 40€/t. "Tout l’enjeu pour la filière est de maintenir les niveaux de production. Pour ce faire, la culture doit rester compétitive par rapport aux autres cultures de l’exploitation. Sans des perspectives de prix satisfaisantes, les producteurs pourraient à nouveau réduire leur assolement", précise Franck Sanders. À ce titre, le syndicat salue la rénovation de l’assurance récolte: "C’est une avancée majeure pour la résilience des exploitations." Il précise aussi que des outils de protection du revenu (ISR, instrument de stabilisation des revenus), permis par la réglementation européenne, seront expérimentés en 2023 sur les régions Île-de-France et Grand Est.

Un marché européen qui retrouve des couleurs

Du côté des marchés, les prix mondiaux du sucre se sont très significativement appréciés depuis deux ans, atteignant des niveaux records. Toutefois, cette conjoncture est à mettre en parallèle de l’équilibre déficit/surplus. "Nous sommes sur un changement de cycle. Après quatre années successives de déficit, des surplus de production sont attendus pour 2023-2024, estimés entre 3 et 7 millions de tonnes. Cette perspective est de nature à orienter les prix à la baisse", explique Nicolas Rialland. À l’inverse, le marché européen est toujours déficitaire. Mais Franck Sanders rappelle que "nous sommes en période de guerre, donc en période d’extrême incertitude. Et dans de grands pays comme l’Inde ou encore le Brésil, les choix politiques sur l’arbitrage éthanol/sucre peuvent complètement bouleverser les équilibres".

La réglementation plonge les campagnes à venir dans l’incertitude

D’ici quelques semaines, la dérogation sur l’usage des néonicotinoïdes devrait être reconduite, ce qui devrait pouvoir sécuriser les intentions de semis pour la prochaine campagne. Mais l’après 2023 est incertain. "Il faudrait trouver avec l’État des solutions adaptées pour éviter la catastrophe de 2020 liée à la jaunisse", précise Franck Sanders. Le PNRI commence à livrer ses premiers résultats. "Nous attendons l’arrivée de variétés tolérantes, mais dans les faits, le potentiel de rendement de ces variétés semble un peu en deçà des variétés standards", ajoute le président. Autre sujet d’interrogation, le projet de règlement européen sur la réduction de l’usage des pesticides, qui prévoit une baisse de 50% d’ici 2030. Un projet qualifié de "funeste" par le syndicat en l’état actuel des choses. "Pour l’heure, cette perspective n’est pas tenable, d’autant qu’il n’y a aucune étude d’impact. Nous attendons que la commission revoie sa copie", précise Nicolas Rialland.

Malgré ces incertitudes, la filière mise sur ces débouchés porteurs, notamment du côté de la filière alcool/bioéthanol avec le développement de SP95-E10 et l’engouement autour du SP E85. Le débouché de la pulpe de betterave en alimentation animale ou dans les méthaniseurs est lui aussi porteur. Beaucoup d’espoirs sont aussi fondés sur les crédits carbone comme future source de revenus pour les planteurs engagés.

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