Agriculture et crédits carbone ne sont pas synonymes de jackpot !

Agriculture et crédits carbone ne sont pas synonymes de jackpot ! Crédit : bakhtiarzein

Le secteur agricole, par le stockage du carbone, fait partie des leviers indispensables à la baisse des émissions de GES. Pas un jour d’ailleurs, ou le sujet n’est pas sur la table des différentes filières. Mais attention au piège du miroir aux alouettes ! Force est de constater qu’engager un changement de pratique n’est pas synonyme de jackpot. Il faut plutôt le considérer comme le chemin vers un système vertueux aux retombées positives… sur le long terme.

Aujourd’hui le constat est simple, sous la pression des consommateurs, les entreprises, celles de l’agroalimentaires, mais pas seulement, sont contraintes de décarboner leur activité, et le secteur de la production agricole est au cœur du processus. "Ces entreprises ont et vont avoir des besoins énormes de crédits carbone et cherchent à s’impliquer sur leur territoire. Fini le temps où l’on plantait un arbre à l’autre bout de la planète pour verdir son activité", explique Bastien Sachet, directeur exécutif d’Earthworm à l’occasion d’un webinaire organisé par La Ferme digitale.  

Fin août 2021, le ministère de la Transition écologique et solidaire a approuvé la méthode pour le label bas-carbone en grandes cultures. Concrètement, ce label permet à des porteurs de projets (agriculteurs) de s’investir dans des pratiques qui stockent le carbone ou permettent de réduire les émissions. En contrepartie, ils obtiennent des "crédits carbone" achetés en bout de chaîne par des opérateurs sur un marché de gré à gré.

Le marché du carbone n’est pas mûr

Certains y voient déjà la poule aux œufs d’or, mais il faut savoir raison garder "le prix moyen d’un crédit carbone (une tonne équivalent C02) est de l’ordre de 30 euros. Il est fort probable que compte tenu de la demande, ce tarif augmente, mais c’est à relativiser si l’on compare avec le coût d’une implantation d’interculture. Pour l’heure, le marché n’est pas mûr, il est sans doute préférable de ne pas se précipiter", commente Matthieu Archambeaud, président d’Icosysteme.

À l’occasion du webinaire, les intervenants questionnent aussi la fiabilité de la mesure de ces crédits carbone : "Les méthodes retenues sont basées sur des modélisations, ce qui complexifie les mesures. Mesurer un taux de dénitrification par exemple, c’est complexe et variable en fonction du sol et du climat. Plus concrètement, pour une forêt implantée il y a vingt ans, c’est simple de quantifier le carbone stocké, mais pour un système agricole, vous pouvez très bien stocker du carbone pendant quatre ans et, pour une raison technique et climatique, libérer le carbone au préalable séquestré", prévient Matthieu Archambeaud. Pour François Thiérart, fondateur de MyEasyFarm, "aujourd’hui, les calculs se basent sur le déclaratif des agriculteurs ; il faudra demain leur opposer des données certifiables par le biais des outils numériques (données satellites par exemple). Cette notion de monitoring tangible amène de la fiabilité et de la crédibilité au sujet."

Prudence est mère de sûreté

Autre vœu pieux pour les intervenants, celui d’une harmonisation à une échelle plus globale : "Il est clair que la France est en avance sur le sujet, il n’existe pas d’équivalent au Label bas-carbone ailleurs, et l’idéal serait que ce soit harmonisé, au moins à l’échelle européenne, voire internationale. Mais c’est aujourd’hui complètement illusoire, les obstacles sont trop nombreux. Mais souhaitons que le sujet soit sur la table de la COP26 qui se tiendra à Glasgow à la fin du mois d’octobre 2021."

Sur ce sujet du carbone, prudence est mère de sûreté ! Le stockage du carbone par l’agriculture n’est pas sujet à débat, mais imaginer qu’il soit une manne financière, c’est un peu comme de "mettre la charrue avant les bœufs". "Toutefois, il faut dès à présent s’emparer de ces sujets, les agriculteurs doivent être moteurs et enclencher cette dynamique pour redonner de la valeur agronomique et environnementale à leur système à moyen terme. L’agriculture demande de la patience, les changements ne s’observent que sur un pas de temps relativement long", conclut Matthieu Archambeaud.

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