L’ozone de l’atmosphère, véritable ennemi des cultures

L’ozone de l’atmosphère, véritable ennemi des cultures. © Alex/Adobe Stock

On ne compte plus les publications qui incriminent l’agriculture et sa contribution négative à la qualité de l’air pour les polluants atmosphériques qu’elle émet (ammoniac, produits phytosanitaires…). Mais ce que l’on évoque que très (trop ?) rarement, c’est le fait que cette pollution atmosphérique a des effets aussi négatifs sur la production végétale.

À l’occasion du Salon de l’agriculture 2020, l’Inrae a organisé une conférence sur ce thème de la pollution atmosphérique, car il s’agit d’une problématique environnementale d’ampleur, elle concerne toute la population et interroge tous les acteurs. Ainsi en 2019, l’Anses rappelle que « c’est une problématique sans frontière et multi-sources qui concerne tous les secteurs d’activité dont l’agriculture. Elle est à l’origine d’effets aigus ou chroniques sur la santé et elle est liée à des émissions directes dans l’atmosphère mais aussi à des phénomènes complexes de chimie, photochimie atmosphériques rendant possible la formation de substances secondaires nocives ».

Lors de cette conférence, un volet était consacré à l’impact de la qualité de l’air sur l’agriculture. Jean-François Castel, de l’UMR écologie fonctionnelle et écotoxicologique des agrosystèmes (Inrae AgroParisTech) rappelle que si l’agriculture est émettrice, elle subit elle aussi un certain nombre d’impacts liés à la qualité de l’air. Il précise toutefois que le sujet est complexe, qualifiant ces polluants « de soupe de polluants qui interagissent entre eux et qui induisent en fonction de leur proportion relative, des réponses différentes selon les végétaux ». Parmi les polluants les plus connus et étudiés, la molécule d’ozone O3. 

Comme il l’explique, ce gaz se diffuse dans les plantes à travers les stomates. Premier impact significatif, le rendement ! Une étude de Paris-Grignon datant de 2009 indique qu’une augmentation de 7% de la concentration d’ozone dans l’atmosphère entraîne une baisse de rendement du blé de 20% (variété Soisson). Pour le spécialiste, la molécule d’ozone perturbe la photosynthèse et le fonctionnement physiologique de la plante. Autre effet de la molécule (plus visible), un impact significatif sur « la qualité des produits en provoquant, chez certaines espèces, des nécroses cellulaires, justifiées par un processus de suicides collectifs des cellules en réponse à cette oxydation », précise Jean-François Castel. « Entre autres conséquences, la commercialisation des produits ou encore la qualité alimentaire dégradée. Si l’on prend pour exemple une prairie naturelle, les légumineuses étant plus sensibles que les graminées, au fur et à mesure du temps, les légumineuses vont disparaître. »

 

© Soloviova Liudmyla/Adobe Stock

Coût économique de l'ozone sur le blé : 2 milliards d’euros

D’autres études ont chiffré les conséquences économiques pour la culture du blé à l’échelle européenne. En 2000, la concentration d’ozone observée aurait induit une perte de rendement de 13% entraînant une perte de 3,2 milliards d’euros. Selon la même étude, une projection avait été réalisée pour l’année 2020, en faisant l’hypothèse d’une baisse de la concentration d’ozone induite par des politiques de réduction. L’impact sur le rendement hypothéqué était de 9% pour une perte économique de 2 milliards d’euros. Ces estimations ne prennent pas en compte la volatilité des cours du blé. D’autres études prospectives et théoriques, Humblot et al, 2013, Ecological Economics, émettent l'hypothèse en 2030 d’un remplacement, dans les régions les plus concernées, du blé par l’orge (plus tolérante à l’azote). Ce qui signifierait à l’échelle des exploitations une rentabilité moindre.

Concernant les pistes génétiques, Jean-François Castel indique que la recherche de génotype résistant est rendue compliquée car « les mécanismes de réponse sont complexes et les chaînes de détoxification des molécules d’ozone ne sont pas encore complètement connues ».

Certes, l’agriculture est émettrice de certains polluants atmosphériques, mais elle en subit aussi les conséquences. Un constat qui doit interpeller d’une part le monde agricole, mais aussi un public moins averti sur le fait que la qualité de l’air est l’affaire de tous, y compris celle du monde agricole qui a tout intérêt à y contribuer de manière positive.  

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